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Revue n° 30, 1997

Dans le monde entier, des ateliers de danse pour les jeunes œuvrent en faveur de la tolérance

PLAU, Allemagne — Après une tournée d’un an dans 19 pays, les membres de l’atelier de danse « Diversity Dance Workshop » (DDW), se sont habitués aux surprises : depuis l’impossibilité de traverser la frontière de la Croatie à cause de la guerre jusqu’aux caprices d’un nouveau minibus qui, par trois fois, s’est retrouvé les pneus crevés.

C’est à l’occasion d’une visite dans ce village agricole de l’ex-Allemagne de l’est que la plupart des membres de l’atelier ont ressenti leur plus grand choc de l’année. Plusieurs « skinheads » – jeunes réactionnaires qui se rasent la tête pour affirmer leur foi dans la séparation ethnique et raciale – ont sympatisé avec le groupe théâtral dont le principal message est de militer en faveur de la diversité.

Après une représentation dans une école, un groupe de skinheads a commencé à se moquer du groupe, dont la musique et les danses dynamiques évoquaient le refus de la drogue et du racisme. Ils ont continué a harceler les membres du groupe lors d’une réunion organisée par les jeunes après la représentation, leur reprochant d’être originaires de races et de cultures différentes.

Plus tard, l’un des membres ayant parlé avec les skinheads et la chaleur et l’ouverture d’esprit manifestées par le groupe ayant fait leur effet, certains skinheads ont baissé la garde et ouvert le dialogue.

« Ils nous ont expliqué pourquoi ils n’aimaient pas que des étrangers et des immigrants viennent en Allemagne » dit Diesel Schrader, le membre de l’atelier qui a engagé la discussion avec les skinheads. « Ils ont l’impression qu’ils leur prennent leurs jobs. Mais nous avons parlé de tout cela en profondeur et le lendemain ils ont demandé à nous revoir et ont manifesté le désir de rester avec nous. »

Les jours suivants, les skinheads sont devenus certains des plus grands admirateurs du groupe, ont assisté à plusieurs spectacles et, d’une manière générale, ont changé radicalement d’attitude.

« A notre dernière représentation, ce sont eux qui ont mis de l’ambiance dans la salle et qui nous ont bissé », nous dit Vahid Khamsi, membre du groupe, âgé de 20 ans. « Et à la fin du spectacle, quand nous avons énuméré les pays dont nous venions, ils nous ont encouragés et ont été jusqu’à nous dire qu’ils aimaient notre danse antiraciste. »

Fiana Keleta, âgée de 18 ans et membre de l’atelier précise qu’au début les skinheads portaient des bottes de combat, des blousons de cuir et des T-shirts portant des slogans nazis. « A la fin, ils ont enlevé leurs T-shirts et les ont mis à l’envers. Et ils ont cessé de boire devant nous, » ajoute cette jeune fille originaire des États-Unis.
« Et pendant notre dernier spectacle, ils se sont assis au premier rang. L’une des filles qui était avec eux a pleuré devant notre numéro de danse multiculturelle. Elle était vraiment touchée. »

Un acte de revirement

Ce type de réaction enthousiaste et de revirement à l’égard de l’atelier de danse qui se compose essentiellement de jeunes bahá’ís n’est pas rare du tout, ni en ce qui concerne ce groupe en particulier ni la plupart des centaines d’autres groupes de danse et de théâtre bahá’ís qui existent dans plus de 50 pays du monde.

Créés aux Etats-Unis d’Amérique dans les années 70 pour les jeunes délaissés, victimes du racisme, de la violence et de la drogue, ces ateliers de jeunes bahá’ís cherchent à toucher le cœur des jeunes en leur adressant un message comportant des valeurs positives et des principes spirituels.

Ils s’y emploient de deux manières : premièrement, les membres de l’atelier sont encouragés à examiner entre eux les problèmes sociaux difficiles tout en apprenant à faire du théâtre et à danser de manière improvisée. Dans un deuxième temps, parfois quasi simultanément, ils donnent des représentations gratuites à l’intention de leurs aînés et leur délivrent un message personnel qui souligne la nécessité de mettre fin aux préjugés raciaux, de renoncer à la drogue, de promouvoir la femme ainsi que d’autres principes sociaux progressistes.

En tant que moyen pour lancer aux jeunes un message constructif, ces ateliers ont été couronnés de succès. Ils se sont répandus à travers le monde sans aucune organisation centrale ni direction et se sont reproduits à mesure que les jeunes reprenaient les idées de leurs aînés.

Et quand cette idée d’atelier s’est répandue, d’autres groupes constamment renouvelés de jeunes ont constitué un répertoire caractéristique toujours en évolution de danses et de musiques inspirées des cultures du monde entier, depuis le « rap » et le « hip-hop », qui ont pris naissance dans les centres urbains américains, jusqu’aux danses et aux chants traditionnels autochtones des différentes nations représentées par le groupe. Avec la diversité comme thème, tous les ateliers projettent un sens caractéristique de l’ouverture au monde qui se reflète non seulement dans leur répertoire mais dans leur composition.

« Le message essentiel de ces ateliers est celui de « l’unité dans la diversité » , dit Oscar DeGruy qui a lancé le premier atelier à Los Angeles dans les années 70 et s’emploie depuis à expliquer ce que recouvre cette idée dans le monde. « Nous essayons de dire que tous les hommes, malgré leurs différences, ont été créés pour apporter au monde quelque chose en retour et que la meilleure façon de résoudre les problèmes est de travailler ensemble, » dit M. DeGruy. « L’atelier est en lui-même une expérience multiraciale et multiculturelle pour les jeunes ».

Bien que la majorité des ateliers soit composée de jeunes n’ayant reçu qu’une formation artistique limitée, certains ont déjà atteint un degré de professionnalisme élevé. Ils ont donné des spectacles dans le cadre des activités culturelles des grandes conférences des Nations Unies, de festivals artistiques régionaux et de différents forums pour les jeunes. Mais qu’ils soient réalisés à un niveau professionnel ou à un niveau d’amateur, ces spectacles ont été presque partout positifs et ont touché le cœur des spectateurs. Par exemple:

• L’atelier intitulé « Les vagues du troisième océan », composé de 32 jeunes de 11 pays, a fait le tour de la Chine en juillet et en août 1997 pour établir des liens d’amitié, de fraternité et d’amour. « Nous avons reçu des invitations spéciales de hauts fonctionnaires et avons pu applaudir certains des plus grands artistes et chanteurs du nord de la Chine, « dit M. Mithaq, directeur de l’atelier. « Qui plus est, nous avons touché le cœur des jeunes avec lesquels nous avons partagé tant d’expériences sur le plan de l’inspiration et ils ont touché le nôtre. Alors qu’un petit nombre d’entre nous partagions un repas, un jeune chinois a fait observer que “si tous les hommes croyaient en cette unité dans la diversité, notre monde serait plus pacifique” ».

• En Grèce, l’Atelier de danse « Ablaze » a lancé un projet local destiné aux jeunes de Thessalonique et, avec l’aide d’autres jeunes d’Europe, a organisé une tournée de deux semaines à travers la Grèce en juin, attirant des foules enthousiastes et beaucoup d’échos dans la presse locale. « Notre présence dans le groupe a été une expérience spirituelle et une sorte d’incursion dans le proche avenir où les jeunes changeront le monde, » dit Jutta Strieh qui a aidé à conduire le car du groupe. « L’esprit d’unité, d’amour et de compréhension mutuels, associé à des consultations, des prières et des moments de détente réguliers, a très souvent été une surprise pour les adultes. »

• En Équateur, il existe au moins 11 ateliers nationaux pour jeunes. En février dernier, 25 représentants des différents ateliers se sont réunis pour un cours de formation de trois semaines et ont ensuite fait une tournée dans sept villes. Ils ont visité non seulement des écoles mais aussi une maison de retraite et une maison de correction pour jeunes délinquants.

Antidote aux troubles raciaux

M. DeGruy et sa femme Freddie, aujourd’hui décédée, ont ouvert chez eux des ateliers de danse et de théâtre pour les jeunes dès 1974 pour faire face aux troubles raciaux qui ont secoué la communauté noire des jeunes de Los Angeles. « Dans un premier temps, notre action visait les jeunes de notre entourage » dit M. DeGruy âgé aujourd’hui de 47 ans. « Nous avons commencé à travailler avec une troupe d’acteurs du voisinage mais, petit à petit, comme nous étions bahá’ís, nous avons constaté que les enfants étaient intéressés par notre foi et d’autres jeunes bahá’ís se sont aussi joints à nous. »

Ces jeunes ont vite constaté que l’art, en particulier lorsqu’il est modéré au travers des principes spirituels et moraux, peut avoir un effet puissant sur la transformation des êtres. « Le théâtre permet de résoudre des problèmes qui peuvent se poser à vous, » dit Aixa Sobin, professeur de danse d’origine portoricaine de 26 ans qui travaille avec les ateliers bahá’ís depuis 1989. « Par exemple si on vous proposait de la drogue, vous pouvez jouer sur scène la réaction que vous devriez avoir. C’est aussi une bonne méthode pour éclairer l’esprit des jeunes et leur apprendre plus de principes concernant la vie en société. C’est aussi un moyen pour apprendre à travailler avec les autres. »

Les premiers ateliers de Los Angeles ont donné des spectacles à l’occasion de différentes manifestations et conférences et l’idée s’est très vite répandue à travers le pays. « C’était de l’auto-reproduction, » dit M. DeGruy. « D’autres enfants d’autres communautés nous ont vus et se sont demandé : “Mais pourquoi ne ferions-nous pas la même chose?” »

Comme les ateliers sont décentralisés, il est difficile d’évaluer exactement combien d’entre eux fonctionnent à un moment donné. M. DeGruy rappelle que selon un sondage qu’il avait effectué en 1995, il y en avait plus de 100 aux États-Unis et autant dans le reste du monde répartis dans une cinquantaine de pays.

Au fil du temps, certains numéros de danse courants ont évolué. L’un des plus marquant est tout simplement intitulé « Danse antiraciste ». Les danseurs y sont divisés en deux groupes, l’un tout habillé de blanc et l’autre de noir, pour symboliser la division des races. La plupart des membres des deux groupes ont les yeux bandés. Au début, deux jeunes de chaque groupe, apparemment trop innocents pour avoir les yeux bandés, se dirigent au milieu de la scène et se lient d’amitié. Ils sont ensuite violemment tirés en arrière par les adultes de leur propre groupe qui ont les yeux bandés et qui, par gestes, communiquent leur méfiance et leur haine à l’égard de l’autre groupe. Enfin, les plus jeunes se mettent eux aussi des bandeaux sur les yeux.

Au cours de cette scène dramatique, les jeunes retirent leurs bandeaux, reviennent au milieu de la scène et font ainsi devant tous les spectateurs la démonstration que les races peuvent s’unir. A la fin, tout le monde suit leur exemple et retire son bandeau - pour symboliser le caractère aveugle des préjugés - et une joyeuse danse finale s’ensuit.

Si cet exercice paraît simpliste – voire mélodramatique – sur le papier, il peut avoir un effet puissant sur l’auditoire s’il est accompli par un groupe de jeunes sincères. C’est ce qui a été démontré par un atelier de Springfield, au Massachusetts (États-Unis) qui s’est produit devant un parterre d’enseignants d’une école publique qui suivaient un stage de recyclage multiculturel juste avant la reprise des cours en septembre.

« Si j’avais ouvert la bouche, je me serais mise à pleurer, » dit Lola Conley, enseignante en deuxième année à Springfield dont les commentaires ont été repris par d’autres. « Ils peuvent nous en dire long sur ce que nous devrions être aujourd’hui. Nous étions en prise directe avec la réalité et nous nous prenions à espérer que le monde pouvait être ainsi. »

Un modèle d’éducation morale

Au Forum des ONG sur les femmes en 1995, réunion qui s’est tenue parallèlement à la quatrième Conférence mondiale sur les femmes en Chine, un atelier spécial de six membres originaires des États-Unis a recommencé son spectacle cinq fois et a été sélectionné pour la cérémonie de clôture devant environ 15 000 personnes.

« Nous avons exécuté deux danses : l’une sur la violence domestique représentant les femmes comme des conciliatrices et un rap sur la noblesse et la dignité de la femme montrant la nécessité pour les hommes et les femmes de travailler ensemble, » nous explique Leili Towfigh, étudiante de 27 ans qui a participé à la tournée en Chine et est aujourd’hui secrétaire du comité national bahá’í des jeunes aux États-Unis. « Beaucoup de gens ont été surpris par cette manière de présenter les choses. Certains s’attendaient à des numéros de divertissement mais ils ont vite compris qu’il s’agissait de l’aboutissement d’un long processus. C’était un défi que d’essayer de montrer que les ateliers bahá’ís ont pour but de promouvoir le développement mais comme nous sommes parvenus à relever ce défi, le public a commencé à se demander comment ces idées allaient pouvoir être appliquées à la maison. »

« A titre d’exemple, des habitants de l’île de Bougainville en Papouasie Nouvelle Guinée, qui se demandaient comment mettre fin à la violence des bandes, sont venus nous voir et nous ont dit «votre mouvement semble être le seul à pouvoir supprimer la violence sur notre île. » Une autre personne, originaire du Pakistan, voulait parler du rôle des garçons pour aider les filles à se respecter. Une autre femme originaire du sud du Soudan réfugiée au nord du Kenya, qui se servait de l’art pour aider les enfants des camps de réfugiés à surmonter leur traumatisme, nous a manifesté son intérêt pour l’atelier en tant que modèle global d’éducation, » précise Mlle Towfigh.

Elle ajoute que la Danse antiraciste avait été reprise par d’autres ateliers ailleurs dans le monde pour aborder la question d’autres formes de préjugés raciaux, ethniques ou nationaux. « Les ateliers ont repris le thème des noirs et des blancs qui était celui de la danse antiraciste pour parler des guerres aux frontières de Chypre et évoquer le tribalisme au Cameroun ou encore les conflits ethniques en Érythrée et en Éthiopie par exemple » poursuit-elle.

Les ateliers se développent avec l’aide des communautés bahá’íes locales ; le plus souvent celles-ci fournissent des locaux, patronnent les spectacles et/ou participent à la location des places, qu’il s’agisse d’un atelier local ou d’un atelier en tournée. Les communautés bahá’íes locales dans toute l’Europe, par exemple, ont servi d’agents à l’atelier DDW pendant sa longue tournée annuelle qui s’est terminée en septembre. Ils ont non seulement trouvé des locaux pour les spectacles, dans des écoles ou des centres municipaux, mais aussi des lieux d’hébergement pour le groupe dont le voyage a été parrainé par la communauté bahá’íe d’Allemagne.

L’un des aspects du dynamisme particulier qui semble régner dans tous ces ateliers est que ses membres s’efforcent de vivre en harmonie avec les idéaux qu’ils défendent dans leurs danses et avec d’autres principes moraux élevés ce qui rend leurs danses plus crédibles. 

Reportage en collaboration avec Jessica Dacey



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